Parce que la souffrance des chefs d’entreprise mérite d’être vue, entendue, et ressentie autrement que par les mots, des artistes ont choisi de s’emparer du sujet pour lui donner une résonance sensible et universelle. Le dispositif APESA, à la croisée du monde économique, de l’humain et du soin, a inspiré plusieurs artistes qui traduisent, à leur manière, l’intensité des parcours traversés et l’espoir que peut offrir l’accompagnement psychologique.
Parmi ces créations, un hymne lyrique, écrit et composé par Lise Borel, donne une voix singulière aux émotions silencieuses des dirigeants en détresse. Ce morceau, à la fois puissant et délicat, rend hommage à celles et ceux qui luttent dans l’ombre et choisissent de se relever.
L’hymne de Lise Borel
Lise Borel est une compositrice française dont la voix est le matériau de prédilection. Son amour pour la littérature et les arts nourrit ses créations. Elle est lauréate du du Marvin Hamlisch International Music Awards 2021 et de la Japan International Composition Competition 2021.
Quelques mots pour parler de ma propre expérience, et de cet hymne.
Pourquoi un chant APESA ? Pour rassembler et chanter à l’unisson.
La musique va au-delà du réel. Elle ne condamne pas, ne restreint pas. Elle désigne sans déterminer, souligne tout en restant ouverte. Tout le monde peut venir s’y ressourcer, s’y reposer et s’y retrouver. Quels que soient nos préoccupations, nos vies ou nos tracas, la voix entendue est la nôtre. Elle est le fil directeur qui nous éveille à nous-mêmes, totalement.
Comme un passeur, comme un canal, la musique traduit ce que nous sommes et prend les couleurs de notre sensibilité. Cette sensibilité, on la retrouve partout, que l’on soit chef d’orchestre, chef d’entreprise, compositeur ou créateur. C’est une force fragile qui est mise à rude épreuve lorsqu’elle est confrontée au réel. Et pourtant, elle est précieuse et nécessaire. Le « chef » ou le « créateur » ont déjà un poids assez lourd sur les épaules, ne fut-ce que par ces mots qui les désignent.« Gérer » ses musiciens ou ses employés, c’est s’adresser àdes personnalités, des sensibilités. Le créateur est entouré d’informations et doit organiser sa sensibilité par rapport aux mille autres.
Qui suis-je individuellement, seul, confronté au monde ? L’orchestre ou l’entreprise paraissent énormes : tout est possible, tout est à faire... La souffrance est réelle. A être trop submergé par les autres ou par soi-même, on se noie, ons’annule, on se dévitalise et on meurt déjà...
Comment jouer ensemble, rassembler nos idées et créer dans un seul souffle alors qu’il n’y a plus de vie à l’intérieur ? Enretrouvant cette voix, ce socle, cet ancrage. En ayant la certitude que nous sommes entendus. Soudain, j’existe ànouveau grâce à l’autre. Le cœur trouve un autre cœur, les voix se répondent. Je peux parler et chanter, je peux dire « je ». Au lieu d’être un « chef », je deviens maître de moi-même. Quand je crée ou quand je chante, je deviens à la fois« tout » et « un seul ».
Créer, ce n’est pas seulement rassembler plusieurs éléments :c’est aussi être pleinement soi. Le musicien est un maillon – mais pas le maillon d’une chaîne, le terme est trop rigide. Il est plutôt un fil de la tapisserie, ou du tableau. Sans le fil d’or ou le fil rouge, le reste ne peut tenir. Pour le « tout », il faut le « chacun ».
Il ne s’agit pas d’éteindre notre sensibilité, ni ce que l’on est : il s’agit de trouver le juste écho, la juste résonnance, de retrouver un rapport simple et poétique aux choses et à soi.
Soyons ensemble, chantons haut et fort, au fond de nous, un feu qui brûle encore.
Lise Borel
Jean Lecourieux-Bory
Né au début des années 1970, Lecourieux-Bory découvre dès l’adolescence la photographie pour laquelle il se passionne. Il se rend déjà au festival de la photographie d’Arles en tant que visiteur, crée des séries et reste des heures dans une chambre noire.
Opticien puis industriel pendant plus de 15 ans, la passion l’a toujours guidée. À 40 ans, un changement de vie s’opère, il revient à ses premiers amours la photographie. Cette passion originelle est, par conséquent, la plus intense, il y consacre aujourd’hui tout son temps. Il met en place des expositions dans toute la France, présente ses tirages originaux, ses livres et ses reproductions.
Son thème de prédilection est l'entreprise, ceux qui la font vivre et ceux qui en vivent.
Le photographe Jean Lecourieux-Bory propose un travail poignant, en noir et blanc, qui saisit la condition du chef d’entreprise en détresse avec une intensité rare. À travers ses photographies, il donne à voir ce que les mots peinent parfois à décrire : un homme seul, accablé par la charge qu’il porte, prisonnier d’un quotidien qui l’isole même de ceux qu’il aime. Son œuvre, puissamment symbolique, révèle la violence silencieuse des situations de crise mais aussi la dignité de celles et ceux qui les affrontent.
Ce regard artistique met en lumière, autrement, l’importance d’un soutien humain, concret et psychologique. Il participe à briser le tabou de la souffrance entrepreneuriale et à sensibiliser un public plus large à la nécessité de ne pas laisser ces hommes et ces femmes seuls face à l’épuisement ou au désespoir.